année-là, la récolte fut abondante. Pour fêter l'événement, Ali acheta
un canard. Sa mère, excellente cuisinière, en fit un plat si merveilleux
que tous les voisins du quartier en salivaient rien qu'à respirer son
parfum.
Le jeune homme pensa que ce plat royal méritait d'être gouté par le
roi et décida d'aller le lui offrir. Le roi, renommé pour sa gourmandise,
accepta l'offrande et invita le généreux donateur à sa table. Il le chargea
de découper lui-même le canard, curieux de voir comment il allait s'yprendre.
Après une courte réflexion, Ali servit les convives à son idée. La reine,
quand vint son tour, entra dans une belle fureur; elle traita le jeune garçon
d'impertinent et de malotru. Le roi, dissimulant mal son amusement,
feignant d'être offusqué, interpella le jeune homme :- Pourquoi as-tu distribué les morceaux ainsi ? Explique-toi et prends
garde ! Si tes raisons ne sont pas bonnes, tu auras la tête tranchée !
Ali justifia son partage avec une logique déconcertante :
- Pour toi, majesté, j'ai servi le cou et la tête, car tu es la tête pensante
du royaume. Tes deux fils en sont les piliers, aussi ont-ils reçu les
pilons. Les ailes revenaient à tes deux filles, car un jour elles se marieront
et quitteront le palais. Pour la reine, qui passe ses journées assise sur son
séant à ne rien faire, le croupion sied à merveille. Je me suis réservé les
filets, comme tu l'aurais fait toi-même, car tu traites toujours tes invités
avec la plus grande délicatesse.
Le roi Malek fut satisfait de ces réponses pertinentes. Il mangea de fort
bel appétit et offrit sa fille aînée en mariage à Ali. La mère du jeune homme
devint cuisinière de la cour. Tous deux n'ont plus jamais manqué de rien.
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