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lundi 28 novembre 2011

L'oeuf de soleil

Sur une île vivait Milad, pauvre
femme qui ne possédait qu'un
petit lopin de terre. Chaque
jour, elle cultivait et soignait le
taro qui lui fournissait toute sa
nourriture. Un matin qu'elle
allait à son champ, elle aperçut
un œuf dans une touffe de
broussailles. Elle le ramassa et
l'examina de tous les côtés.
Comme elle le tenait en main,
elle le réchauffa, et l'œuf grossit. Milad le rapporta chez elle, car ses mains et sa tête lui disaient que ce n'était pas un œuf d'oiseau, mais du Soleil, que c'était le Soleil qui l'avait pondu afin qu'elle en ait un enfant. Elle l'installa dans une corbeille encore plus douillettement qu'une mère l'aurait fait pour son petit, car Milad n'avait pas d'enfants.

Trois jours passèrent, et l'enfant du Soleil sortit de l'œuf. Elle l'installa au-dessus du feu pour qu'il pousse vite. Il poussa, poussa, comme une tige de bambou, et bientôt il devint un gamin du nom de Terkelel, puis très vite un adolescent. Le jeune homme demanda un jour à Milad :

- Maman, chaque jour nous mangeons la même nourriture, des taros et encore des
   taros, et toujours des taros, pourquoi n'y a-t-il pas autre chose ?

- Je suis pauvre, mon fils, je suis une femme qui n'a qu'un petit lopin de terre. Je
   n'ai pas d'autre nourriture, je n'ai même pas de mari qui pourrait aller pêcher.

Terkelel se promena le long du rivage et chercha parmi les coquillages celui qui lui dirait comment aider Milad. Il trouva soudain ce qu'il cherchait, mais pas parmi les coquillages.

Terkelel plongea dans la mer et nagea, nagea, très, très loin. Puis il plongea, la tête la première et s'enfonça, s'enfonça, jusqu'à arriver profondément sous l'île. Comme un ver, il remonta en perçant la terre de toute l'île et déboucha sous l'arbre à pain qui ombrageait la cabane de sa mère. Il fora d'abord son tronc, puis ses branches, et tandis qu'il avançait ainsi, derrière lui jaillissait l'eau de la mer, entraînant avec elle les poissons. Ils nageaient dans les creux de l'arbre et des branches, puis retombaient devant la maison de Milad. Maintenant la femme et le jeune Terkelel avaient du poisson à ne plus savoir qu'en faire. Ils en avaient tant qu'ils en donnaient aux gens qui n'avaient pas assez à manger. Le poisson était abondant.

Mais sur l'île vivaient des gens qui ne supportaient pas le bonheur des autres. Leur cœur était rempli de jalousie. Une nuit, ils prirent des haches, allèrent vers l'arbre à pain de Milad et en coupèrent une grosse branche. Dès que celle-ci tomba, l'eau de mer se transforma en cascade, elle coula à gros flots, se répandit, et bientôt l'île entière fut sous les eaux. La mer avait avalé l'île comme une plage à marée haute, et avec l'île tous les gens qui y vivaient. Seul le fils du Soleil, Terkelel, resta au-dessus des eaux, il vola plus haut, vers le Soleil. Milad avait d'abord nagé, puis elle avait crié. Et elle était morte.

Terkelel monta jusqu'au ciel, dans sa tête résonnaient les cris de Milad, sa mère. Il se dit : « Je vais demander au roi du ciel de lui rendre la vie. Quand il fut tout près des cieux, il vit se dresser sur sa route l'homme de pierre, le gardien des lieux. Dès que celui-ci surprenait quelqu'un sur le chemin de la voûte céleste, il avertissait les gens dans le ciel. Il sifflait comme un cyclone, car l'air passait à travers ses lèvres de pierre. Terkelel arracha des feuilles de pandanus et y enveloppa l'homme de pierre. Puis il l'emporta. Il arriva au ciel et se présenta devant son roi. Il lui dit :

- Roi du ciel, donne-moi la force vitale, afin que je puisse l'insuffler à Milad, qui
   est morte. Elle était ma mère, et je ne veux pas qu'elle flotte sur la mer et ne
   me parle plus.

Le roi du ciel lui donna la pierre de vie. Puis il dit :

- Si tu poses la pierre sur le corps d'un homme, cet homme sera immortel.

Terkelel prit la pierre, et s'en alla
au-dessus de la mer, où flottait le
corps de Milad. Il y déposa
dessus la pierre, et Milad fut de
nouveau vivante. Puis ils nagèrent
rapidement vers l'île, où ils
vécurent ensemble comme mère et
fils.

Pendant ce temps, le roi du ciel demandait où était l'homme de pierre, car il y avait longtemps qu'il ne l'avait plus entendu siffler. Il envoya ses sept esprits, et ils constatèrent que l'homme de pierre avait disparu. Où ? Ils l'ignoraient. Ils se présentèrent devant le roi, qui leur dit :

- Eh bien faites ce qu'il faut pour le retrouver. Où qu'il soit, allez vite
   le chercher et rapportez-le-moi. Celui qui l'a volé sera puni.

Les esprits descendirent sur l'île dans la mer, ils cherchèrent sur la terre ferme, ils cherchèrent sur l'eau, mais ils ne trouvèrent pas l'homme de pierre. Ils pénétrèrent à l'intérieur de l'île, arpentèrentle rivage, toujours rien. Finalement, ils entrèrent dans un bois touffu, et ils virent l'homme de pierre. Il était caché par des feuilles d'arbres. Les esprits le laissèrent là. Ils voulaient d'abord retrouver et punir le voleur. Soudain ils arrivèrent devant la cabane où habitaient Milad et Terkelel, le fils du Soleil. Les esprits s'approchèrent de la femme et dirent :

- L'homme de pierre est là, dans le bois, derrière ta cabane. Qui a fait cela ? Qui
   l'a apporté du ciel pour le planter dans le bois ?

Milad tremblait comme un arbre quand il sent le souffle de la tempête. Puis elle dit :

- C'est mon fils Terkelel qui l'a apporté.
- Amène-le ici. La punition l'attend au pays du ciel !

Milad entra dans sa cabane. Elle avait des tranches de taro fraîchement cuites, elle les farcit de poisson. Dans le taro brûlant, le poisson avait bouilli, et un parfum puissant et délicieux monta jusqu'au plafond. Puis Milad sortit devant la cabane et donna du taro farci de poisson à chacun des sept esprits. Ils ne connaissaient pas cette nourriture, jamais ils n'y avaient goûté. Ils la trouvèrent extraordinaire et dirent qu'ils n'avaient rien mangé d'aussi bon. Quand ils eurent fini, Milad leur dit :

- C'est mon fils Terkelel qui a apporté l'homme de pierre, mais seulement pour ne
   pas pleurer ma mort. Il s'est rendu au ciel, puis il a ranimé mon corps qui était
   mort.

Les esprits ne dirent rien, trop occupés par le souvenir de la bonne nourriture. Ensuite, ils s'envolèrent vers le ciel avec l'homme de pierre, et le châtiment se noya dans la mer. L'homme de pierre se dressa de nouveau dans les hauteurs, il siffla et fit hurler le vent. Il mena la garde du ciel.

samedi 26 novembre 2011

Devinettes & blagues

J'ai un dos et des pieds, mais je ne peux pas marcher. Qui suis-je ?
Une chaise

Pourquoi les éléphants sont-ils gris ?
Pour ne pas les confondre avec les fraises des bois.

Qu'est ce qui est petit, jaune et qui fait crac-crac  ?
Un poussin qui mange des chips.

Vous avez une fourmi rouge et une fourmi noire sur le dos. Laquelle va doubler ?
Aucune, car on ne double pas sur un dos d'âne

Quel est le cri des fourmis?
Cro-ondes (la fourmi cro-ondes)

Que dit une maman baleine à son enfant qui n'a pas été sage ?
Cétacé

A quoi reconnait-on une baleine fraîche ?
A ses dents : car on dit dents blanches baleine fraîche

Pourquoi la reine d'Angleterre n'aime pas les grenouilles ?
Car elles prennent le thé tard.

Que fait une baleine quand on la chatouille ?
Elle dit : c'est assez car j'ai le dos fin. Puis elle se cache à l'eau.

Pourquoi il ne faut pas passer dans la savane entre 17 et 18 heures ?
Car les éléphants font leurs exercices de parachutage

Pourquoi les crocodiles sont plats ?
Parce qu'ils sont passés dans la savane entre 17 et 18 heures.

Qu'est-ce qui est le bleu dans un pré ?
Une vache en survêtement.

Quand voit-on les vaches couchées sur le dos ?
Quand les trains sont en grêve, elles regardent passer les avions.

Que fait une vache quand elle réfléchit ?
Du lait concentré

Que dit un sapin de noël qui arrive en retard le soir du réveillon ?
Je vais encore me faire enguirlander

Comment nomme-t-on un chat tombé dans un pot de peinture le
jour de noël ?
Un chat peint de noël.

La tarte à la grenouille 3, 4 & 5

Chapitre 3

Le lendemain, une foule de cuisiniers alléchés par la
récompense a envahi le château. Chacun d'eux
porte un panier plein de grenouilles.

- Afin de guérir votre roi, qu'une grave maladie ronge,
   annonce Fulbert, vous allez tous préparer une tarte
   à la grenouille. Je couvrirai d'or celui qui trouvera la 
   recette qui me sauvera.

Aussitôt, les cuisines du château sont prises d'assaut. Les cuisiniers crient, la farine
vole et les grenouilles sautent dans tous les sens. Le chambellan contemple le
désastre en hochant la tête. "Et qui va nettoyer tout ça ? pense-t-il. C'est encore
moi !" A midi, la serviette autour du cou, Fulbert 1er attend avec impatience qu'on
le serve. Cette armée de cuisiniers a dû préparer des dizaines de tartes à la
grenouille. L'une d'elles sera la bonne, le roi en est certain. Et il fait confiance à son
énorme appétit pour les manger toutes !

- Le roi est servi, annonce le chambellan.
- Mille foies gras ! s'écrie Fulbert en ne voyant arriver qu'un tout petit marmiton
   portant une soupière. Qu'on m'explique !
- C'est que... balbutie le chambellan, personne n'a pu faire de tarte. Les grenouilles
   ont toutes réussi à s'échapper. J'ai fait préparer du bouillon...
- Du bouillon !

A ce seul mot, la douleur s'est réveillée, et le
roi grimace. Mais, soudain, un homme poudré
de farine surgit dans la salle. Il porte un plat
recouvert d'une cloche d'argent.

- Moi, j'ai réussi ! annonce-t-il fièrement. Ca
   n'a pas été facile, mais votre Majesté m'en dira des nouvelles !
- Sauvé ! s'écrie Fulbert. Vite, mon ami ! Servez-moi, que je guérisse !

Le cuisinier soulève la cloche et... hop ! une douzaine
de grenouilles s'échappent en coassant !

- Chambellan ! s'exclame Fulbert, qu'on jette tous ces
   cuistots incapables en prison !

Puis, d'un air maussade, il ajoute :

- Et apporte-moi le bouillon...

Ce maigre repas terminé, Fulbert repousse son écuelle et soupire :

- Je ne guérirai donc jamais !
- Je pense que si vous pêchiez les grenouilles vous-même, cela vous guérirait, dit
   alors le médecin.
- Mais bien sûr ! s'écrie le roi en se dressant sur son siège. Dès demain, je m'y mets !
   En attendant, je jure de ne manger que du bouillon !

Chapitre 4 

Le lendemain matin, voilà Fulbert parti, tête nue, en
direction de l'étang. Il porte sur l'épaule une
branche de noisetier à laquelle pend un chiffon rouge.
"J'étais le meilleur pêcheur de grenouilles du royaume
quand je n'étais encore qu'un petit prince", pense-t-il.
Arrivé au bord de l'eau, il agite le chiffon rouge
au-dessus des nénuphars.

- A nous deux, mes mignonnes ! s'écrie-t-il.

Mais les grenouilles étaient plus faciles à prendre
autrefois. Le roi a beau patauger, plonger sur les bondissantes bestioles au
risque de se noyer, son sac reste vide. Son ventre aussi ! Lorsqu'il rentre
au château, fourbu et crotté, la nuit tombe. Dans la salle à
manger, le bouillon fume dans une écuelle.

- Demain, je les aurai ! rage Fulbert en empoignant sa
   cuillère.
- C'est votre seule chance de guérir, dit le chambellan en
   nouant la serviette autour du cou du roi.

Le lendemain, les grenouilles refusent toujours de se laisser
prendre et, vers dix heures, le roi a un petit creux. Affamé,
il abandonne sa canne à pêche au bord de l'eau et s'enfonce dans la forêt.

- Mon royaume pour quelques framboises, gémit-il. Ma couronne contre une
   poignée de noisettes !

Mais ce n'est ni la saison des framboises, ni celle des noisettes ! Le roi finit par se
perdre et arrive devant une petit maison nichée au pied d'un énorme chêne. "Je
vais demander mon chemin", se dit Fulbert.

Il s'approche de la porte et frappe. Une
femme apparaît.

- Entrez donc, dit-elle.

"Elle ne m'a pas reconnu", se dit le roi.

- Je m'appelle Fulbert, dit-il en pénétrant dans
la maison.

Aussitôt, ses narines frémissent. Une bonne odeur s'échappe de la cuisine.

- Je m'appelle Flora, dit la femme.

En voyant le regard d'envie de Fulbert, elle ajoute :

- Vous partagerez bien mon modeste repas.

Les yeux brillant de convoitise, le roi fait oui
de la tête. Flora verse la soupe dans une
écuelle. Assis sur un tabouret de bois, le roi
engloutit le breuvage d'un trait, s'essuie
les lèvres d'un revers de manche et tend son
assiette. Flora plonge à nouveau la louche dans la marmite. La deuxième écuelle est avalée comme la première, d'autres suivent... Si bien qu'à la fin, Flora s'excuse :

- La marmite est vide...

Les deux mains posées sur son ventre rebondi, Fulbert semble enfin rassasié.

- Vous avez un solide appétit ! dit Flora. Il faut dire que vous êtes plutôt ... fort !

Fulbert 1er rougit. La dame a dit fort : elle n'a
pas voulu dire gros, de peur de la vexer !
Bon sang, c'est bien la première fois de sa vie
qu'il regrette son ventre énorme et son triple
menton. Il a envie de parler de sa maladie, la
redoutable boulimite, des régimes qu'il
n'arrive pas à supporter, de la tarte à la
grenouille qui seule peut le sauver...
Seulement voilà, lui, le roi, il n'ose pas.

- Vous aimez la tarte ? demande alors Flora.

Fulbert sursaute. C'est un signe du destin. Flora est une fée ! Elle va sortir de
l'armoire une tarte à la grenouille, il va la manger et il sera guéri !

- La tarte à la... balbutie-t-il. Oui, j'adore ça !

Flora pose le plat sur la table.

- C'est une tarte aux pommes, de mon jardin, dit-elle.

"Est-il possible d'être roi et aussi bête ! se dit Fulbert. Je crois encore aux contes de
fées...". Ce qui ne l'empêche pas de manger une part de tarte tout en bavardant
avec Flora. Mais il se fait tard...

- Je dois partir, dit Fulbert. Merci pour le repas !
- Revenez quand vous voulez...

Le roi s'éloigne, adressant des signes de la main à Flora.

- Je reviendrai demain, crie-t-il avant de disparaître.

Chapitre 5

A la tombée de la nuit, Fulbert 1er arrive dans la salle à manger du château.

- Il est tard, Majesté, dit le chambellan. Dois-je faire réchauffer le bouillon ?
- Inutile, mon ami, répond le roi avec un large sourire. Je n'ai pas faim et je suis
   fatigué. D'ailleurs, je vais me coucher...

"Incroyable", se dit le chambellan. Le lendemain matin, à l'aube, le roi quitte le
château avec son matériel de pêche. Il ne rendre que fort tard, sans grenouilles
et surtout sans appétit. Dès que le roi est couché, le chambellan appelle le médecin et lui dit :

- Notre roi refuse le bouillon de légumes. Il doit
   manger en cachette !
- C'est hélas possible, dit le médecin.

Les jours passent, le roi rentre toujours aussi tard et
se couche aussitôt... Chaque soir, la tête sur
l'oreiller, il pense à Flora, aux longues promenades
qu'ils font tous les deux... A midi, elle lui a fait une
tarte à la rhubarbe... Délicieuse ! Et il a enfin osé lui
parler de sa maladie. De la tarte à la grenouille,
aussi... Elle a promis d'en préparer une demain. Finalement, le roi s'endort en rêvant à sa jolie cuisinière. Pendant ce temps, le chambellan et le médecin complotent :

- Le roi a maigri, dit le chambellan. Il y a là un mystère que nous devons éclaircir.
- C'est entendu, dit le médecin. Demain, nous le suivrons.

Le lendemain, à l'aube, le roi trottine sur le chemin. Deux ombres courbées le
suivent sans bruit. Arrivé près de l'étang, le roi pose sa canne à pêche au
bord de l'eau et prend la direction de la forêt.

- Vous voyez, chuchote le chambellan. Il ne
   pêche pas !
- C'est ma foi vrai, constate le médecin.

Bientôt, ils voient Fulbert pousser la porte de la petite maison.

- Je le savais ! s'écrie le chambellan. Il mange en cachette !

Le médecin risque un oeil à l'intérieur. Il aperçoit le roi et, près de lui, une femme
plutôt jolie... Sur le buffet, une tarte refroidit. Le médecin sourit. Sur la pâte
dorée, une douzaine de grenouilles en pâte d'amandes sont sagement alignées.
Une tarte à la grenouille ! Mais, curieusement, ce n'est pas la tarte qui semble
intéresser Fulbert 1er, c'est la cuisinière ! Il la dévore des yeux...

- Alors ? demande le chambellan.
- Ce que je viens de voir, dit le médecin, même les chambellans doivent l'ignorer.
   Tout ce que je peux dire, c'est que notre roi sera bientôt guéri.

Quelques mois plus tard, en effet, le roi
Fulbert 1er convoque toute sa cour. Il
paraît minuscule sur son trône et flotte
dans ses vêtements trop larges.

- Mesdames et messieurs, annonce-t-il,
   votre bon roi souffrait de boulimite. Il
   est maintenent guéri, et cela grâce à un remède miracle : la tarte à la grenouille.

Le chambellan murmure à l'oreille du médecin :

- Mais il n'a jamais attrapé une de ces maudites grenouilles !
- Notre bon roi a maigri par amour.
- Et la tarte à la grenouille ?
- Secret médical ! répond le médecin en clignant de l'oeil.

Fulbert 1er s'est levé. Il s'adresse à la cour :

- Et comme une bonne nouvelle n'arrive jamais seule, j'ai le plaisir de vous
   annoncer mon mariage avec dame Flora.

Un rideau rouge s'écarte, et Flora apparaît.

- Je donnerai un grand-festin pour mes noces,
   ajoute Fulbert 1er.
- Un petit festin, mon ami, fit Flora d'une voix
   douce. Et il y aura de la tarte à la grenouille
   au dessert...


vendredi 25 novembre 2011

La tarte à la grenouille (chapitre 1 & 2)

Chapitre 1

- Majesté ! Il est dix heures... murmure le chambellan en
   tirant les lourds rideaux de la chambre du roi.

Les édredons de plumes et les oreillers de soie s'agitent...
La tête du roi Fulbert 1er émerge enfin. "La tête des
mauvais jours", pensent le chambellan.

- Ah ! J'ai mal au ventre ! gémit le roi en ouvrant les yeux.
- Votre majesté n'aurait pas dû reprendre quatre fois du
   lard confit à la graisse d'oie.
- Que je souffre !
- Le gâteau de châtaignes au miel était peut-être un peu lourd, suggère le
   chambellan.
- Balivernes ! s'écrie Fulbert 1er. Ce n'est pas ce petit repas d'hier soir qui a pu me
   rendre malade. C'est à peine s'il y avait quatorze plats.
- Quinze, Majesté.
- Quatorze ou quinze, là n'est pas la question ! Aide-moi plutôt à me lever.

Le chambellan empoigne le roi par les revers
de sa chemise de nuit. "Cet animal pèse plus
que dix cochons, pensa-t-il. Il se fera éclater
la panse s'il continue à tant manger !"

- Arrête, malheureux ! dit soudain le roi. La
   tête me tourne et ma vue se brouille.
- Cette fois, vous êtes vraiment malade, Sire.
- Qu'en sais-tu ? Tu n'es pas médecin, que je
   sache ! Une fois debout, ce petit malaise va passer.

Mais aujourd'hui, le roi ne peut se lever.

- Mes jambes refusent de me porter ! se lamente-t-il. C'est bien la première fois
   qu'on me désobéit !
- Dois-je faire prévenir votre nouveau médecin ? demande le chambellan.
- Qu'il vienne sur-le-champ ! Et qu'il ne s'avise pas de me mettre au régime,
   comme ses compères, sinon je le jette en prison lui aussi... s'étrangle
   Fulbert 1er. Je deteste les régimes ! Je les hais ! Je les... Ah ! Mon
   ventre... J'ai mal...

Prononcer le mot "régime" à réveillé la douleur dans l'estomac du roi. Les
médecins ont tout essayé : régime sans sel, sans sucre, sans viande, sans
pain... Fulbert 1er résiste à peine une journée. Il se rattrape le lendemain
en se faisant servir des festins ! Et de régime en régime, le roi grossit...

- Vite, gémit Fulbert 1er, va quérir ce charlatant. Je meurs...

Chapitre 2
Le médecin entre dans la chambre du roi.

- Majesté, dit-il en s'inclinant, permettez que
   je vous ausculte. Si vous voulez bien me
   montrez votre royale bedaine...

Fulbert 1er relève sa chemise de nuit, découvrant son
caleçon et un ventre de baleine. Le médecin pose son
doigt au-dessus du nombril du roi et appuie
légèrement. Un hurlement retentit.

- Aaahhhhhh ! Maudit docteur ! Tu veux ma mort ! Je
   t'interdis de me faire souffrir de la sorte !
- A vos ordres, Majesté, dit le médecin. Votre
   seigneurie voudra bien tirer la langue, ce n'est pas
   douloureux.
- Soit, dit Fulbert 1er.

La langue du roi est violette et gonflée.
"Indigestion ! pense aussitôt le médecin.
Il lui faut un régime et de l'exercice".
Mais il se garde bien de le dire. Il
fronce les sourcils et se met à faire les
cent pas dans la chambre en
marmonnant des mots incompréhensibles.

- Que dis-tu, Charlatan ? s'écrie Fulbert 1er.

Le médecin ne semble pas l'entendre. Il continue à parler tout seul en tournant en
rond. A chaque fois que ses yeux se posent sur le roi, il secoue la tête avec
tristesse. Fulbert 1er ne sait quoi penser. Son ventre est plus douloureux que
jamais et le manège du médecin commence à l'inquiéter.

- C'est... c'est grave ? demande-t-il d'une toute petite voix. 

Le médecin s'est enfin arrêté. Il contemple le
roi comme s'il le voyait pour la dernière fois.

- Gravissime ! annonce-t-il d'une voix
   lugubre. Votre majesté est atteinte de
   boulimite. Je suis désolé...

Appuyé sur ses oreillers, Fulbert 1er devient tout pâle.

- Je suis prêt à tout faire pour guérir, dit-il. Même un... un... un régime !
- Inutile, votre majesté. Il n'y a plus d'espoir. A moins que...

Une lueur s'allume dans l'oeil du roi.

- Parle, médecin ! s'écrie-t-il. Si tu connais un remède, parle, je t'en prie...
- Un seul remède peut guérir la boulimite. La tarte à la grenouille !

Fulbert 1er plisse les yeux, soudain méfiant.

- Ne serais-tu pas en train de te moquer de
   moi, coquin ?
- Nenni, Majesté... dit le docteur. Je m'en
   vais de ce pas chercher mon livre de
   médecine. En attendant, le chambellan
   va essayer de vous mettre sur pied.

"Les corvées sont toujours pour moi", se dit le chambellan en retroussant ses
manches.

Quelques instants plus tard, alors que le roi a réussi péniblement à rejoindre son
trône, le médecin est de retour. Il feuillette un énorme grimoire.

- Ah, je vais guérir bientôt ! s'écrie Fulbert.
- Hélas, Majesté, annonce le médecin, mon livre parle bien de la tarte à la
   grenouille, mais nulle part il n'en donne la recette !

Le visage du roi se décolore.

- Je suis fichu ! gémit-il.
- Non, il reste une chance, dit le médecin.
   Faites venir les meilleurs cuisiniers du
   royaume. L'un d'eux trouvera peut-être
   la recette qu'il vous faut. En attendant,
   bouillon de légumes, sinon...
- Excellente idée ! s'exclame Fulbert 1er.
   Chambellan, fais annoncer dans toute la
   province que le roi offre mille écus à qui fera la meilleure tarte à la grenouille...
- Vos désirs sont des ordres, Majesté, dit le chambellan.

                                                                       A SUIVRE...

mardi 22 novembre 2011

L'envol de Coutordu

Quelle agitation dans la mare ! Les canards sont enfin prêts pour le grand départ. Quel tintamarre :

- Coin coin, as-tu fini les
   valises ?
- Coin coin, où sont les
   chemises ?

Demain, à l'aurore, les
volatiles prendront leur envol. Après quatre mois passés au chaud, les oiseaux migrateurs vont rentrer chez eux. Maman canard est inquiète. Son petit dernier, Coutordu, ne sait toujours pas voler. Depuis quinze jours il agite ses ailes, mais sans succès. Il retombe de suite par terre. Flap, flap, boum, badaboum ! C'est certainement à cause de son cou
tordu, pense tristement sa maman. Ses grands frères et grandes soeurs se moquent de lui constamment :

- Quel bébé, toujours dans les ailes de sa maman. Il a un drôle de cou, et en plus, il
   ne sait pas voler !

Coutordu a beau essayer, il n'arrive toujours pas à s'envoler plus haut que trois plumes.

- Je vais retourner voir pépé, pour mes leçons. Selon lui, c'est un problème de
   concentration, décide le petit canard.

Le pépé de Coutordu est sourd comme un pot. Il faut lui parler très fort pour qu'il
entende.

- Allez, mon petit, il faut
   vraiment que tu
   réussisses aujourd'hui.
   Sinon, tu resteras tout 
   seul ici, l'avertit pépé.
   As-tu répété la
   formule magique ?

- Oui, des milliers de fois.
   Coincoindabri,
   coincoindabra, dans
   les airs tu t'envoleras !

- Il faut vraiment que tu y croies, concentre-toi ! 

Coutordu répète encore et encore la formule, mais flap, flap, flap, boum et
badaboum.

- Je n'y arriverai jamais, ta formule est vraiment trop nulle ! s'écrie Coutordu en
   courant se cacher derrière un buisson. Bouh bouh, c'est trop dur ! gémit le
   caneton.

Pépé ne sait plus que faire, le petit canard ne semble pas fait pour voler dans les
airs. Après avoir beaucoup pleuré, Coutordu veut retourner s'excuser auprès de
son pépé. Mais que voit-il ? Un énorme crocodile qui s'approche tout doucement
de son papy.

- Sauve-toi, pépé ! crie Coutordu.

Mais le vieux canard ne l'entend pas et continue son chemin.

- Pépé, derrière toi, hurle Coutordu en vain. Il faut que j'y arrive, s'encourage le
   petit canard. Sinon, pépé sera dévoré. Coincoindabri, coincoindabra, dans les
   airs tu t'envoleras !

Mais Coutordu reste cloué au sol.

- Allez, il faut y arriver, pour pépé !

Le prédateur se rapproche dangeureusement de pépé canard. Coutordu rassemble
son courage et récite :

- Coincoindabri, coincoindabra, dans les airs tu t'envoleras !

Flap, flap, FLAP, FLAP !

- Je vole ! s'exclame le petit canard en fonçant sur le crocodile.

A l'aide de son bec, il pique la tête de
la méchante bête. Il évite de justesse
les coups de queue et donne un coup
de bec entre les yeux du reptile.

- Va-t-en, sale volatile ! hurle, en
   s'éloignant, le crocodile.

Coutordu se pose à côté de son pépé.

- Tu as réussi, mon chéri ! Et en plus
   tu m'as sauvé la vie ! Mille fois
   merci !

Pépé et Coutordu rentrent aile dessus,
aile dessous à la mare. Maman canard
est très fière. Tous les habitants de la mare fêtent le courage de Coutordu et son premier vol. Le lendemain matin, les canards écoutent attentivement le chef du clan :

- Afin de récompenser les efforts de Coutordu, je lui ai réservé la place d'honneur !

 Les volatiles se positionnent tous en v derrière le jeune canard.

- Coincoindabri, coincoindabra, dans les airs tu t'envoleras.

Coutordu prend son envol, suivi par tout son clan. Quelle fierté d'être devant !
Ses frères et soeurs sont un peu jaloux, mais plus jamais ils ne se moqueront de
son cou.

lundi 21 novembre 2011

Le trésor du roi

Oh ! lala ! Ce matin, le roi est de très mauvaise
humeur ! Il a dû se lever du pied gauche.
Quand il est sorti de sa chambre, avec les
cheveux encore en bataille et sa tête des
mauvais jours, il n'a pas prononcé un seul mot,
même pas un petit bonjour. Il ne devait pas être
bien réveillé ou alors quelque chose le tracassait,
car il n'était pas comme d'habitude. Il avait même
enfilé sa chemise à l'envers, lui qui d'ordinaire
était si soigné avec ses habits. Bizarre, bizarre...
Mais le pire arriva juste après.

Alors qu'il s'apprêtait à se mettre à table pour prendre son petit déjeuner, le roi,
toujours muet, s'est pris les pieds dans le tapis et, comble de malheur, il a voulu
se raccrocher à la nappe pour se rattraper... Vlouff, bling, en moins de temps
qu'il n'en faut pour le dire, la table du petit déjeuner se retrouva par terre et le
bol de céréales se renversa directement sur... la tête du roi ! Aïe aïe, aïe, ouille,
ouille, ouille, la journée commençait décidément très mal !

A 8 heures pétantes, le roi décida de
convoquer toute son armée ! Il avait
l'air très préoccupé.

- L'heure est grave, annonça-t-il, l'air sérieux.
   Un précieux trésor a été dérobé cette nuit
   au château. Nous devons absolument mettre
   la main sur ces coquins de voleurs ! Qu'on
   selle immédiatement les chevaux les plus rapides !
- Avez-vous des indices ? Par où doit-on commencer les recherches ? Quel est
   le montant exact du butin ? s'enquirent aussitôt les chevaliers.
- Une valeur inestimable ! Mais je ne peux pas vous en dire plus. Ce trésor, j'en fais
   une affaire personnelle ! Vous monterez la garde pendant que je fouillerai 
   moi-même les maisons !

Le roi et les chevalier en armure sillonnèrent toute la journée les villages alentour,
mais rentrèrent bredouille. Impossible de mettre la main sur ce précieux trésor !

- Je ne vois qu'une explication à cette
   disparition, déclara le roi. Le voleur
   est parmi nous ! Qu'on lève
   immédiatement le pont-levis et qu'on
   ferme les grilles, personne ne doit
   sortir du château, ordre du roi !

Chambres, cuisines, caves, oubliettes, coins
et recoins, le roi inspecta toutes les pièces
du château jusqu'aux minuscules trous de
souris, mais en vain. Le trésor était introuvable. Epuisé et la mine défaite, le roi se retira alors dans sa chambre. Personne se savait plus quoi faire devant tant de mystère.

L'heure de goûter passa, puis l'heure du dîner aussi. Le roi restait toujours enfermé
dans sa chambre. Finalement, on alla chercher sa nourrice préférée, Soazig, qui
l'avait élevé comme son fils. Elle seule savait lui faire entendre raison. Soazig
frappa à sa porte et, n'entendant pas de réponse, elle se décida à entrer. Assis par
terre, le roi répétait entre deux sanglots :

- Il est perdu, on me l'a volé. J'en suis sûr. Je ne le
   retrouverai plus jamais !

Soazig connaissait bien cet air triste. Elle se baissa
aussitôt pour regarder sous le lit, tira les couvertures,
puis souleva carrèment le matelas. Elle attrapa alors
un morceau de tissu vert qu'elle tendit au roi en
souriant.

- Tenez, je crois que je l'ai retrouvé votre précieux
   trésor !
- Oh ! Dragonou, tu étais là ! Je t'ai cherché partout ! Comme tu m'as manquée !
   Merci Soazig !

Epuisé par cette rude journée, le roi s'allongea et s'endormit aussitôt en serrant
tout contre son coeur le plus précieux des trésors : Dragonou, son doudou.

dimanche 20 novembre 2011

Le sauvetage de Bruno le cochon

C'est l'été, les vaches paissent, les moutons
somnolent, les lapins sont assoupis, la
basse-cour est endormie. Bruno le cochon
est le seul à ne pas se réjouir du beau
temps aujourd'hui.

Pourtant, il vit dans une ferme où tous les
animaux sont choyés et dorlotés. Il se
délecte chaque jour de sa nourriture
préférée, de tendres épis de maïs. Enfin, il
y a devant sa porcherie une grande flaque
de boue douce et fraîche dans laquelle il adore se rouler. Mais Bruno est bien morose, car il se sent seul et mal aimé. Il en a assez d'entendre toujours les mêmes réflexions : "Bruno, tu es trop gros...". "Pouah ! Bruno, tu sent mauvais !" "Mais enfin, Bruno, tu as vu comme tu es sale ?"

A chaque fois, ces paroles dites en riant le blessent profondément. Lui, ça ne le
fait vraiment pas rigoler... Alors, c'est décidé, aujourd'hui Bruno va s'en aller.
Il va chercher un coin tranquille où il pourra se salir à loisir, sans entendre aucune
moquerie. Le coeur lourd, il prépare son baluchon en se demandant s'il retrouvera
un endroit aussi plaisant.

Quand Bruno passe devant les canards en partant, ils font comme s'il était
transparent. Ils se dandinent fièrement ou nagent en glissant sur l'eau lisse de la
mare. Alors que le cochon se retourne une dernière fois, il aperçoit un caneton
qui trottine près de la flaque. C'est Arsène, l'un des petits de Béatrice. Soudain,
Bruno entend "plouf" et voit Arsène s'enfoncer dans la boue : il a glissé, ses
pattes palmées ont dérapé.

- Au sec...

Bruno lâche alors son baluchon et se précipite
vers la flaque.

- J'arrive, Arsène !

Mais Arsène a déjà disparu. Son cri a alerté
toute la basse-cour, sa maman est affolée.

- Mon petit, au secours, mon petit...

Les poules, les canards et les oies se sont approchés. Terrifiés à l'idée de se salir, ils
trépignent sur le bord. Et assistent au plongeon de Bruno qui les éclabousse : Ils ont
de la boue partout !

Après une attente insoutenable, Arsène reparaît à la surface, essouflé et apeuré.
Dégoulinant, il se hisse sur le bord. Après l'avoir débarbouillé, Béatrice n'oublie
pas de la gronder :

- Mais enfin, Arsène, qu'est-ce qui t'est passé par la tête ? Pourquoi t'es-tu approché
   de cette flaque dégoûtante ?

Encore choqué, le caneton reste muet. Tous les animaux se tournent alors vers
Bruno. On l'avait oublié... Béatrice s'approche de lui.

- Monsieur Bruno, je vous dois un grand merci... et aussi quelques excuses.

La cane a soudain honte d'avoir toujours été si dure avec Bruno qui n'a pas hésité à
sauver son caneton.

- Où alliez-vous avec ce baluchon ? Vous partiez en vacances ?
- Eh bien, je...je voulais...

Une boule dans sa gorge empêche Bruno de terminer sa phrase.

- Si vous avez un moment, j'aimerais bien vous offrir
   un petit rafraîchissement.

L'invitation de Béatrice soulève un enthousiasme
général. Et c'est ainsi que la journée se poursuit
près de la mare aux canards. On distingue bien
Bruno au milieu des poules, des canards et des
oies. C'est vrai qu'il est plus gros qu'eux, un peu
plus sale aussi certainement. Mais personne n'y prête attention. Et surtout pas Arsène qui ne quitte plus son sauveur. Le soir venu, le petit caneton raccompagne le cochon.

- Bonne nuit, Bruno. Et merci...
- De rien, mon petit. Mais à l'avenir, tâche dêtre plus prudent.
- Promis. Je pourrai venir te voir demain ?
- Eh bien... pourquoi pas, si ta maman le permet.
- Bien sûr qu'elle voudra, après ce que tu as fait pour moi.

Bruno regarde Arsène s'éloigner. Il ne sait pas ce qu'il va faire demain, encore
moins s'il partira au loin. Il va déjà attendre la visite du caneton...