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samedi 17 octobre 2015

La malicieuse Zorille


Les antilopes avaient toujours peur du lion. Ce dernier, puissant et de race noble,
attaquait les parents, les enfants et les grands-parents.

Un jour de grand deuil, à l'occasion d'un malheur de plus, le chef du troupeau des
antilopes rassembla les siens et s'en alla trouver la Zorille dont la réputation n'était
plus à faire. Il entrevoyait un espoir à son désarroi, dans son intelligence et sa ruse.

- Amie Zorille, éloigne de nous le danger si
  menaçant et si grave ! Sauve-nous du lion !
  Il ruine nos familles.

- Soit, mes amis, je réduirai pour vous le
  lion à l'impuissance, parce que vous êtes
  belles et gracieuses et que votre regard est
  très doux !

Ainsi, désireuse de leur venir en aide, elle promit de trouver une solution à leur malchance. Elle courait en petits bonds et se roulait rapidement en boule, comme
une championne d'athlétisme, tant elle était désireuse de faire du bien aux
antilopes et de rabattre un peu la morgue du fauve.

Après s'être isolée dans une fente d'un gros rocher pour y réfléchir en paix, elle
rendit visite à la reine des fourmis :

- Reine, je sollicite votre intervention pour sauver les antilopes de l'appétit féroce
  du lion. Pourriez-vous mettre à ma disposition votre armée d'ouvrières ?

La reine accepta et aussitôt fit appeler tous ses sujets. On en vit sortir des
termitières, des fourmilières, des fourrés et des feuilles, et des bois morts. Il y
avait des rouges et des noires, des minces et des puissants, toutes, habiles et
audacieuses.

Elle les fit se ranger sous la bannière de la
Zorille, puis elle leur intima l'ordre
d'exécuter tout ce que leur nouveau chef
commanderait.

La cohorte, armée de lance-aiguilles et
chaussée de débris de feuilles cousues,
se mit en campagne et, à la nuit tombée,
fut bientôt en vue de l'acacia sous lequel s'était endormi le fauve.

Alors, tel un grand stratège, le Zorille ordonna :

- Soldats, envahissez l'ennemi, couvrez sa fourrure, pénétrez ses oreilles et ses
  yeux, qu'il hurle de douleur et de peur !

Bien sûr, le maître de la savane n'entendit pas les légers piétinements des fourmis,
mais que de picotements, véritables décharges électriques, n'eut-il pas à souffrir ?

- Pitié, pitié ! implorait-il à ces mystérieux adversaires.

Mais l'attaque redoubla. Alors retentit dans toute la savane le cri déchiré du lion.
Lui, naguère le roi, fort et puissant, noble et respecté de tous, était maintenant
conquis par une escouade de fourmis.

C'est depuis ce jour que le fauve rugit de haine.
Alors, les antilopes savent quand il approche
et prennent la fuite. Bien sûr, il est étonné de
n'avoir jamais plus rencontré d'antilopes sur
son chemin et j'ai même entendu dire qu'il s'en
plaignait beaucoup !



La Malicieuse Zorille - Kama Sywor Kamanda - K.S.Kamanda

La vie des mots

Je prends un mot,

je l'accueille,

je l'écoute

je lui souhaite la bienvenue,

puis je recherche un autre mot

qui pourra s'entendre avec le premier,

c'est une histoire d'oreille,

l'écriture,

c'est une histoire d'amour aussi,

l'amour des mots

qui s'aiment tellement

qu'ils souhaitent vivre ensemble,

pour toujours,

sur la page


François David - Les croqueurs de mots - Editions Motus

samedi 18 avril 2015

Né dans un chou-fleur

Aujourd'hui, Mina a eu une bonne surprise. Sa tante Sophie lui a envoyé
une belle carte postal d'Afrique pour son anniversaire. Sur la photo, elle
peut voir des tas de choux-fleurs et, au milieu, un bébé.

- Cédric, Cédric, regarde la carte que m'a envoyée tante Sophie. Tu as vu,
   ce sont des choux - fleurs avec un bébé. Tu te moquais de moi lorsque
   je te disais que les garçons naissaient dans les choux. Maintenant, tu en
   as la preuve ! Et d'abord c'est Mamie qui m'a appris que les garçons
   naissent dans les choux.
- Oui, oui, c'est ça, et les filles naissent dans les roses.
- T'as qu'à regarder, na, na, na !

Cédric s'approche de la carte et reste le souffle coupé. C'est bien vrai, il y a
des choux - fleurs et un garçon au milieu. Ca alors ! Cédric examine la photo
de plus près. Tiens, tiens, bizarre, ce bébé porte un vieux pantalon, en fait...
c'est un homme.

Avec ses six ans et demi, Cédric se débrouille bien pour lire. Il retourne la
carte et déchiffre un peu laborieusement la légende. Tout à coup, il éclate
de rire :

- Oui, oui, c'est bien ça, en Afrique, les garçons naissent... dans le coton !

Péniblement il lit à haute voix :

- Ba-llots de co-ton à Thon-a-kkkah. C'est vrai que tout emballées dans ces
   toiles vertes, comme de grandes feuilles, ces balles de coton blanc ont
   vraiment l'air de choux - fleurs. Ah, ah, ah !

Furieuse, Mina lui arrache la carte et essaie de décrypter ces signes
incompréhensibles. Elle n'y comprend rien ! Pas question d'attendre la
rentrée prochaine : dès ce soir, elle demandera à Maman de lui apprendre
à lire !

365 Histoires avant de s'endormir - Editions Piccolia

samedi 21 février 2015

L'histoire du bonbon

- Coralie, donne-moi un bonbon !
- Non, dit Coralie.
- Allez, donne-m'en un !
- Non.
- Rien qu'un seul !
- Non et non.
- Et si je dis : s'il te plaît Coralie Cochon ma
   sœur chérie, tu m'en donnes ?
- Tiens, t'as qu'à le planter, ça fera un arbre à
   bonbons et tu me ficheras la paix.
- Menteuse ! dit jean.

Dans un coin du jardin, Jean creuse un trou.
Il y dépose le bonbon et, pour bien le
couvrir, il fait avec la terre une petite
montagne.

Jean apporte aussi un parasol et une petite
radio, pour que le bonbon ne s'ennuie pas. Des fois, il lui chante les comptines qu'il a apprises à l'école. Et chaque matin, Jean arrose le bonbon.

- Sinon, pense-t-il, ça ne peut pas pousser.

Il attend toute la journée. Il attend toute le nuit; et il attend encore trois jours
et trois nuits. Au quatrième matin, une petite fleur mauve sortit de la montagne;
peut - être à cause du bonbon, ou peut - être parce que c'était le printemps.

L'histoire du bonbon - Anaïs Vaugelade - Lutin Poche de l'Ecole des Loisirs

La lune brille

La lune brille, et les lumières de la ville scintillent dans la nuit. Les gens
vont et viennent dans la nuit, à pas précipités, mais le chat s'assoupit au
bord de la fenêtre.

La lune brille, et le fleuve miroite sous les lumières du port. Des bateaux
naviguent dans la nuit, remontent le fleuve dans la nuit, mais le poisson
entre deux eaux s'endort.

La lune brille, et sur la route les éclairs des phares trouent la nuit. Dans
la nuit les autos vrombissent. Des camions passent en rugissant; mais au
creux de sa carapace la tortue s'assoupit.

La lune brille, et la grange luit doucement dans la nuit des champs. Des
nuages s'amassent dans la nuit. Le tonnerre gronde dans la nuit; mais le
veau s'endort dans son lit de paille.

La lune brille, et sur la montagne la lumière du chalet tremblote. Le vent
gémit dans la nuit. La neige tourbillonne dans la nuit; mais devant l'âtre
le chien dort profondément.

La lune brille, et dans l'aéroport les projecteurs illuminent la nuit. Des
avions décollent dans la nuit. Des passagers attendent leur vol; mais le
mulot ivre de sommeil se faufile vers son trou.

La lune brille, et les lumières des pavillons éclairent les jardins. Des
rires résonnent dans la nuit. Les voisins s'interpellent, mais tout en haut
d'un arbre le pinson s'assoupit.

La lune brille, et dans la chambre une lampe brûle dans la nuit. Maman
chante dans la nuit. Papa éteint la lampe, et la fillette s'endort en rêvant
à la lune.

La lune brille - Bethea VerDorn - L'Ecole des Loisirs

vendredi 20 février 2015

DAWACO IYO DURBAAN - Le chacal et le tambour

Conte Somalis

Waxaa la yiri beri baa waxaa jirey dawaco si qarsoodi ah inta beer nin
leeyahay u gashay ka xadi jirtey miraha ka baxa.

Maalin maalhama ka mid ah bay dawacadii maqashay cod ay ka yaabtay
waxa uu yahay. Dawacaddii ma ogeyn in ninkii beerta lahaa, markii uu
arkay in mirihii laga xaday, geed ka soo laalaadiyey durbaan markii
dabayshu ruxdaba ku dhacaya geedka jirriddiisa, si codkiisa weyn
shimbiruhu uga cararaan beerta oo u cinin miraha ka baxay.

Dawacadii baa aragtay durbaankii weynaa oo mooddey neef ari ah oo
buurani in uu ku dhexjiro oo ka ciyayo. Miciyahii iyo ciddiyohii
dheerdheeraa bay dawacadii ku jeexjeexday durbaankii, waxayna ogaatey
in uu weel maran yahay.

Armaaba waxyaalaha jira kan ugu qiimaha xumi yahay midka ugu
qaylada dheere ugu buuran bay dawacadii isku waansatey, baa la yiri.


Un jour, un chacal affamé entra dans un jardin pour voler des fruits.
Le propriétaire du jardin, constatant que ses fruits avaient disparu,
accrocha à un arbre un énorme tambour, que le souffle du vent faisait
bouger et retentir.

Les oiseaux, épouvantés, n'entrèrent plus dans le jardin, mais le chacal,
très curieux, s'en approcha quand même :

- Quel bruit assourdissant et bizarre ! je parie que dans ce gros tambour
  quelqu'un a caché une chèvre. Ce sont sûrement ses sabots qui produisent
  cet horrible bruit ! pensa-t-il, en se lançant de toutes ses forces contre
  l'étrange instrument.

L'ayant déchiré, le chacal découvrit que le tambour était vide. Il se
consola en se disant :

- Eh bien, les choses qui font le plus de bruit sont souvent celles qui ont
  le moins de valeur !

Sheekooyiin - Contes Somalis - Axmed Cartan Xaange - L'Harmattan 

Le sac à disparaître

Aujourd'hui, c'est noël.

- Oh, oh ! dit Damien. Il me tarde de voir mon cadeau...
- Regardez ! s'écrie Robert, le grand frère J'ai un équipement complet
  de hockey !
- Et moi, annonce Colette, la grande sœur, une trousse à maquillage !
- La boîte du parfait petit chimiste ! claironne Dorothée, l'autre grande
  sœur.
- Moi, j'ai un ours, dit Damien, un ours en peluche !

Quelle matinée ! Robert manie la crosse, Colette les crayons et Dorothée
pipettes et pilons. L'après-midi, les trois grands échangent leurs cadeaux.
Dorothée se pomponne, Robert joue avec les éprouvettes et Colette
devient championne de hockey.

Puis Robert se dessine des moustaches, Dorothée marque des buts et
Colette invente un gaz affreux.

- Je peux jouer avec les éprouvettes ? demande Damien.
- Non, tu es trop petit ! répond Dorothée. Tu ferais sauter la maison.
- Je peux patiner ? demande Damien.
- Non, tu es trop petit ! répond Robert. Tu te ferais mal.
- Je peux me faire une tête de clown , demande Damien.
- Non, tu es trop bête, répond Colette. Tu gâcherais mon rouge à
  lèvres.
- Mais je vous prêterai mon ours ! dit Damien.
- On n'en veut pas ! On est trop grands ! crient les trois enfants.
- Viens, on va habiller ton ours, propose la mère.
- Non ! répond Damien.
- Viens, on va promener ton ours, propose le père.
- Non ! répond Damien.

Pendant le dîner, Damien boude dans son coin.

- Que lui arrive-t-il ? demande le père.
- Il a dû se donner un coup de crosse, dit Robert.
- Il a dû manger mon rouge à lèvres, dit Colette.
- Non, il a respiré le gaz affreux, dit Dorothée.

Damien boude toujours, près de l'arbre de noël. Soudain, il aperçoit
un paquet qu'il avait oublié. Il l'ouvre. Et que découvre-t-il ? Un sac
invisible... Un sac à disparaître magique !

Damien se glisse à l'intérieur et... disparaît !

- Damien ! appelle Robert.
- Je suis là ! crie Damien.
- Où ça ? demande Robert, étonné.
- Où est passé Damien ? demandent Colette et Dorothée.
- Cherchez-moi ! crie Damien.

Impossible de retrouver le petit frère.

- Et s'il avait explosé ? lance Dorothée.
- Ou alors, il est devenu si beau qu'on ne le reconnaît plus ! suggère
  Colette.
- Papa ! hurle Robert, Damien patine si vite qu'on ne le voit plus !

La tête de Damien surgit brusquement.

- Où étais-tu passé ? demande Robert.
- J'étais dans mon sac magique, répond Damien.
- Oh, tu me le prêtes ? s'écrie Robert.
- Moi d'abord ! dit Colette.
- Tiens, prends mes éprouvettes, dit Dorothée.

Damien ouvre son sac magique et les trois grands disparaissent
aussitôt. Damien peut enfin patiner... inventer de savants mélanges...
se faire une tête de toutes les couleurs... jusqu'à l'heure d'aller au lit.

- Déjà ! s'écrie Damien.
- Tu me prêteras ton sac, demain ? demande Colette.
- Tu me le prêtes pour dormir ? demande Dorothée.
- A propos, tu l'as bien rangé ? dit Robert.

Et, cette nuit-là, Damien s'endormit heureux, près de son ours en
peluche.

Le sac à disparaître - Rosemary Wells - Folio Benjamin

mercredi 18 février 2015

Le loup et le grillon

Une fois, le loup, de sa grosse patte, écrasa le nid du grillon. En colère,
le grillon lui dit :

- Tu me le payeras.
- Tu veux peux être te battre
   contre moi ? dit le loup.
- Oui bien, nous ferons bataille.
- Eh bien ! quand tu voudras.
- Demain, après-midi.

Le loup, pour faire son armée,
loua le renard, le tigre, le lion
et d'autres grosses bêtes; le
grillon, pour faire la sienne,
loua les abeilles et les frelons.

Le lendemain, le loup dit au renard :

- Midi approche. Va voir quand le grillon veut la faire, cette bataille.

Le renard y alla. Le grillon lui dit :

- Veux-tu voir mes soldats ? Veux-tu avoir l'étrenne de quelques-uns ?
- Oui bien, si tu veux.

Le grillon lâcha quelques abeilles et quelques frelons. Quand il vit ça,
le renard de fuir. Il s'en
retourna au grand galop,
avec quelques bonnes
piqûres au museau.

Quand il fut revenu à la
tanière du loup, celui-ci
lui dit :

- Eh bien ! renard, qu'en dis-tu,
  de ces soldats ?
- Oh ! dit le renard, ils ne sont pas bien gros, mais ils sont bien dégourdis.

Que croyez-vous ? Ils l'ont faite, leur bataille ?
Eh bien, moi, je n'en suis pas sûr, pas du tout.

Contes Merveilleux des Pays de France - Tome 1 - Dagmar Fink - Iona

Le chat et la souris couturière

Conte Marocain

Dans le temps, la souris était
une couturière de renom. Le
chat comptait parmi ses
meilleurs clients.

Un jour, le chat amena une
belle étoffe à la souris pour
que celle-ci lui couse  une
djellaba. La souris, éblouie
par le tissu splendide, en rongea
chaque jour un bout, si bien qu'il n'en resta plus assez pour l'habit du chat.

Chaque fois que le chat se présentait pour essayer son vêtement, la souris
lui disait qu'elle n'avait pas encore fini l'ouvrage. Lassé, le félin menaça le
rongeur de porter l'affaire devant les juges.

C'est à ce moment là que la petite couturière décida de sauver la face. Elle
confectionna avec le reste du tissu une besace, qu'elle présenta au chat. Lequel
fou de rage, s'abattit sur la souris, menaçant de la dévorer.

La souris eut juste le temps de s'engouffrer dans son trou. C'est ce jour là, et
pas un autre jour, quoi que l'on dise, qu'est née l'antipathie entre le chat et
la souris.

Histoires de chats - Marilyn Plénard - Flies France

mardi 27 janvier 2015

Histoire d'un chat noir

Conte Gersois


Une femme, qui avait grande envie d'un chat, vivait dans un canton du
Gers.

Un beau jour, elle s'en alla à la foire de Fleurance, vendre quelques paires
de volailles et trouva un chat noir, derrière un pilier du marché couvert. Sur
la fin de la foire, la femme prit ce chat, qu'elle emporta chez elle.

Pendant trois jours, elle le fit manger à côté d'elle, à table, avec un
couvert, un gobelet et une serviette. Comme un humain.

Le soir, elle le faisait coucher dans son lit. Mais, le quatrième jour,
la femme oublia de mettre le couvert du chat noir.

- Femme, dit le chat noir, pourquoi n'as-tu pas mis mon couvert ?

La femme, épouvantée, s'en alla de ce pas conter l'affaire à un
vieux curé fort savant.

- Bonne femme, dit le curé, retournez bien vite porter ce chat noir où
  vous l'avez trouvé !

La femme obéit. Elle repartit aussitôt pour Fleurance, le chat noir sous
le bras, qu'elle replaça derrière le même pilier du même marché
couvert.

- Femme, dit le chat noir, il t'a bien renseignée, celui qui t'a renseignée.
  Si tu ne m'avais pas rapporté ici avant le coucher du soleil, je
  t'étouffai cette nuit.

Et le chat s'en alla.

Histoires de chats - Marilyn Plénard - Flies France

La biche blanche au bois

Il était une fois un roi qui voulait se marier et qui ne savait trop laquelle
prendre de deux jeunes filles. Il finit pourtant par en choisir une, et le
mariage se fit.

Au bout de quelque temps, la reine accoucha d'un fils. Ce jour-là, le
roi, c'était pas au château : la jeune fille dont il n'avait pas voulu profita
de son absence pour se glisser auprès de la reine et, comme elle était
sorcière, elle la changea en biche blanche et prit sa place.

Si, dans les 3 jours, personne ne délivrait la reine, elle devait rester
enchantée toute sa vie. Bichaudelle seule, la servante de la reine,
avait vu ce qui s'était passé, mais elle n'osa le dire à personne, car
elle aurait été, elle aussi, changée en biche blanche.

Le lendemain, le roi revint au château. Il entra dans la chambre où
était la sorcière et, croyant que c'était sa femme, il lui demanda
comment elle allait.

- Pas trop bien, et si je ne mange pas de biche blanche au bois, je
  mourrai.

Le roi s'en fut à la chasse et poursuivit longtemps la biche; mais
celle-ci se cachait dans les taillis, dans les broussailles, si bien qu'il
ne put l'atteindre.

La nuit, la vrai reine revint :

- Bichaudelle, ouvre-moi ta porte.
- Plaît-il, dame ?
- Le roi est-il couché ?
- Oui, dame, il est au chevet, qui tient sa dame par la main.
- Hélas ! plus que deux nuits, mon cher fils, et si le roi ton père ne
  me délivre, je serai biche blanche au bois à jamais !

Les serviteurs entendirent tout, mais ils n'osèrent rien dire. Le matin,
le roi vint trouver la sorcière et lui demanda comment elle allait.

- Pas trop bien, et si je ne mange de la biche blanche au bois, je
  mourrai.

Le roi poursuivit encore la biche, mais elle se cachait dans les taillis,
dans les broussailles, et il ne put l'atteindre. La nuit, la reine revint
encore :

- Bichaudelle, ouvre-moi ta porte.
- Plaît-il, dame ?
- Le roi est-il couché ?
- Oui, dame, il est au chevet, qui tient sa dame par la main.
- Hélas ! plus qu'une nuit, mon cher fils, et si le roi ton père ne
  me délivre, je serai biche blanche au bois à jamais !

Les serviteurs avaient encore entendu les paroles de la reine, et
cette fois, ils les rapportèrent au roi. Le matin, le roi vint demander
à la sorcière comment elle allait.

- Pas trop bien, et si je ne mange de la biche blanche au bois, je
  mourrai.

Le roi poursuivit la biche, mais il ne la pressa pas tant que les autres
jours. La biche se cachait dans les taillis, dans les broussailles, et
elle échappa au roi.

La nuit, la reine revint; le roi s'était caché dans un coin de la chambre.

- Bichaudelle, ouvre-moi ta porte.
- Plaît-il, dame ?
- Le roi est-il couché ?
- Oui, dame, il est au chevet, qui tient sa dame par la main.
- Hélas ! plus que cette nuit, mon cher fils, et si le roi ton père ne
  me délivre, je serai biche blanche au bois à jamais !
- Non, ma bien-aimée, s'écria le roi, vous ne le serez pas plus
  longtemps.

Au même instant, le charme fut rompu. Le roi fit mourir la méchante
sorcière et vécut heureux avec sa femme.

La biche Blanche aux bois - Contes Merveilleux des pays de France - IONA