Le tigre et le chat sauvage

Jadis, le tigre et le chat sauvage

étaient amis. Un jour que tout

deux crevaient la faim sous un

soleil brûlant, le tigre dit au

chat sauvage :

- Vieille branche, cher collègue,

   je me sens très las d'avoir

   marché et je meurs de faim.

   Viens donc chez moi te reposer

    un peu. Il y a une cloche de pierre qui fait "dang-dang", des tambours de pierre qui font "dong-dong", un banc de pierre pour t'asseoir, un lit de pierre pour te coucher, des cochons gras à dévorer, des moutons gras à te servir.

Le chat sauvage ne se laissa pas duper par ces belles paroles : le tigre voulait
le croquer ! il répondit :

- Vieux camarade, cher collègue, ta maison est dans une grotte haut perchée
   dans la falaise blanche. C'est bien trop loin ! Aujourd'hui, viens plutôt chez
   moi. Demain, je viendrai te rendre visite.

- D'accord, vieille branche ! Où perches-tu ? As-tu quelque chose à manger ?
   Des jouets amusants ?

- Bien sûr ? On passe une vallée, on contourne un coteau, et, hop ! On est chez
   moi. Ma maison est rouge; du balcon, on voit jusqu'au fleuve. J'ai des coqs,
   des poules, ce sera suffisant pour notre repas.

Le tigre réfléchit : il ne perd rien pour attendre ! Allons donc chez lui...
Ils passèrent par le vallon, contournèrent le coteau, et arrivèrent chez le chat

sauvage. Ils se trouvèrent devant un liquidambar fort haut. Le tigre vit que, sur

une branche, se trouvait un immense champignon parfumé de couleur rouge,

aussi large qu'un parapluie. Le chat sauvage dit :

- Nous sommes arrivés !

Il grimpa sur l'arbre, alla danser sur le dais que formait le champignon parfumé,

et il se mit à chanter :

- Miao ! Miao ! Mon pavillon est

   bien rouge, le paysage du

   Guangdong est beau ! Miao !

   Miao !

Le tigre eut envie d'en faire autant :

- Je voudrais voir un peu
   comment c'est, là-haut !

Il essaya de grimper à l'arbre, mais il glissait, glissait... et finit par renoncer. C'est
ainsi, on en est sûr, que le chat sauvage trompa le tigre.