Un pauvre petit grillon caché dans l'herbe fleurie
regardait un papillon voltigeant dans la prairie.
L'insecte ailé brillait des plus vives couleurs;
l'azur, le pourpre et l'or éclataient sur ses ailes;
jeune, beau, petit-maître, il court de fleurs en fleurs;
prenant et quittant les plus belles.
Ah ! disait le grillon, que son sort et le mien sont
différents ! dame nature pour lui fit tout et pour moi rien.
Je n'ai point de talent, encore moins de figure;
nul ne prend garde à moi, l'on m'ignore ici bas : autant
vaudrait n'exister pas.
Comme il parlait, dans la prairie arrive une troupe d'enfants;
aussitôt les voilà courants après ce papillon dont ils ont tous
envie. Chapeaux, mouchoirs, bonnets, servent à l'attraper.
L'insecte vainement cherche à leur échapper, il devient
bientôt leur conquête. L'un le saisit par l'aile, un autre par le corps;
un troisième survient et le prend par la tête.
Il ne fallait pas tant d'efforts pour déchirer la pauvre bête.
Oh ! Oh ! dit le grillon, je ne suis plus faché;
il en coûte trop cher pour briller dans le monde.
Combien je vais aimer ma retraite profonde !
Pour vivre heureux vivons caché.
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