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jeudi 12 mai 2011

Un amour de crocodile

Madame Pravout voulait un compagnon. Pourtant, madame
Pravout n'était pas seul. Elle avait déjà une perruche. Mais
la perruche ne l'amusait plus du tout. Madame Pravout avait
envie d'un animal un peu extraordinaire. Un beau matin, elle
se rendit en ville et elle acheta ... un bébé crocodile.

Ce crocodile-là tenait dans une main. Il était couvert
d'écailles vertes, et quand il ouvrait la gueule on apercevait
deux rangées de minuscules dents blanches.

- Oh, comme il est mignon ! s'écria madame Pravout. Je
   l'appellerai Crokinou.

Madame Pravout revint chez elle avec le crocodile et fit couler un bain dans
l'évier. Il se mit aussitôt à nager. Le lendemain, Lucas, le petit-fils de madame
Pravout, tendit la main pour caresser Crokinou.

- Grand-mère, ton crocodile m'a mordu !
   cria-t-il.

- Mais non ! dit madame Pravout. Tu as
   dû t'égratigner dans le jardin. Crokinou
   ne ferai pas de mal à une mouche.

Pourtant, depuis l'arrivée de crokinou, on ne
voyait plus une mouche, plus une araignée,
plus le moindre insecte dans la maison de
madame Pravout. Madame Pravout adorait
son Crokinou. Elle lui avait fait un lit dans une boîte à chaussures, avec de jolis petit draps et une jolie petite couverture. Elle l'emmenait se promener au bout d'une toute petite laisse. Et comme il n'y avait pas de nourriture spéciale pour crocodiles, elle lui donnait de la pâtée pour chats et pour chiens qu'elle mélangeait avec un peu de poisson.

Et crokinou grandissait, grandissait. Il fut bientôt trop grand pour sa boîte à
chaussures, et madame Pravout lui prépara un lit dans une caisse. Crokinou
était devenu bien trop grand pour nager dans l'évier, alors madame Pravout
lui offrit sa baignoire. Et elle dut bientôt remplacer sa petite laisse par une corde.

Un jour, Lucas vint voir sa grand-mère. Il
entrouvrit la cage et laissa s'envoler la
perruche. Crokinou ouvrit la gueule et,
hop ! il avala l'oiseau tout entier.

- Grand-mère ! s'écria Lucas, ton crocodile
   vient de manger la perruche !

- Mais non, dit madame Pravout, elle a dû
   s'envoler par la fenêtre. Crokinou ne ferait
   pas de mal à une mouche.

Crokinou souriait. Son grand sourire découvrait une cinquantaine de dents
d'une éclatante blancheur.

- Cui ! cui ! fit-il.

Et le crocodile grandissait, grandissait... Quand il devint trop grand pour son petit
lit, madame Pravout l'installa dans le sien. Et comme il ne tenait plus dans la
baignoire, elle creusa un bassin dans son jardin, et elle remplaça la corde par une
grosse chaîne.

Un jour, alors que Crokinou se prélassait dans
son bassin, le chat de la voisine passa par là.
Crokinou le regarda, ouvrit la gueule et, hop !
il l'avala.

- Madame Pravout ! s'écria la voisine, votre
   crocodile vient de manger mon chat !

- Mais non ! dit madame Pravout, votre chat
   a dû se cacher quelque part. Crokinou ne
   ferait pas de mal à une mouche.

Crokinou souriait. Son immense sourire découvrait une centaine de dents d'une
éclatante blancheur.

- Miaou ! fit-il.

Et le crocodile grandissait, grandissait ... Bientôt, il fut trop grand pour le lit de
madame Pravout et il dut dormir dans le couloir. Crokinou était devenu trop
grand pour le bassin. Madame Pravout prit l'habitude de l'arroser au tuyau
d'arrosage, et elle remplaça la chaîne par un énorme câble.

Un jour, dans un jardin public, Crokinou vit un chien qui courait derrière un
ballon. Le crocodile ouvrit la gueule et, hop ! d'un coup il avala le chien.

- Dites donc, madame ! s'écria le maître du
   chien, votre crocodile vient de manger
   mon chien !

- Mais non ! dit madame Pravout, votre chien
   a dû se sauver. Crokinou ne ferait pas de
   mal à une mouche.

Crokinou souriait. Son énorme sourire
découvrait deux centaines de dents d'une
éclatante blancheur.

- Ouah ! ouah ! fit-il.

Et le crocodile grandissait, grandissait ... Il était devenu plus grand que la maison,
et lorsqu'il dormait, sa tête dépassait d'un côté, et sa queue de l'autre. Il devint
même trop grand pour aller dans le jardin, et madame Pravout prit l'habitude de
lui faire sa toilette avec une éponge humide. Et elle ne pouvait plus l'emmener en
promenade. Un jour, Lucas vint voir madame Pravout à l'heure du goûter.

- Grand-mère ! appela-t-il.

Mais personne ne répondit. Dans la maison, il
n'y avait que Crokinou. Et Crokinou souriait.
Son sourire était le plus gigantesque qu'on ait
jamais vu.

- Il ne ferait pas de mal à une mouche, dit-il.

Puis il regarda Lucas ouvrit la gueule, et ...
Lucas s'enfuit à toutes jambes.


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